Post pour rapidinnovation.fr … la simplicité de l’innovation ?

Post pour rapidinnovation.fr : https://nbry.wordpress.com/2016/05/31/the-pleasure-to-innovate-with-stephane-bernard/

1) You share the exemplary innovation story of Mathieu Dombale in this video, sorting out some key principles for innovation success: listening to and observing users with empathy, transversality, pilot phase, open source, business practices reviews / knowledge sharing, back and forth between experience and theory, students conferences to transfer knowledge. Which principles actually struck you the most in this fantastic story? Because of their impact or modernity, for example.

C’est une histoire systémique, presque totale. En 1816 Mathieu de Dombale s’attaque à une des questions de l’agriculture de son époque « améliorer le travail du sol ». Pragmatique il va aller dans les champs observer les charrues travailler puis il « bricolera » dans son atelier une charrue améliorée qu’il mettra au point. Fort des performances de son outil, il s’engagera avec obstination dans sa propagation abordant et résolvant tous les questionnements qui se poseront à lui.

Toutes les dimensions de l’innovation sont présentes ; sa méthode (observer, expérimenter, et revenir à la théorie), sa capacité à aborder toutes les problématiques qui se présentaient à lui (la mise au point de l’outil, les tests et l’apprentissage du maniement de sa charrue, l’invention des « défis de charrues » pour démultiplier les occasions d’expérimentations et de propagation, la formation et la pédagogie (il créera l’institut de Rouville), l’exemplarité (en créant la ferme exemplaire au sein de laquelle il expérimente toutes ses idées dans le « système réel et complexe » que représente une ferme), la création d’une usine d’outillage et enfin la mise à disposition publique de ses plans et de ses expérimentations qu’elles aient réussies ou ratées.

Il restera comme celui qui a inventé et propagé les réunions agricoles, formé les personnalités qui fonderont les écoles d’agronomie, inventé les baux longs pour les locations de terres agricoles. Il faut savoir qu’avant lui les locations étaient conclues pour une durée de seulement 3 ans, ce qui ne permettait pas aux paysans de gérer les rotations de culture.

Parti chimiste les historiens du XX ème siècle le reconnaitront comme étant le père de la pédagogie active. Comme quoi il ne faut pas avoir peur de chercher à acquérir de nouveaux savoirs faire.

L’homme est attachant. Au début de cette aventure, à 40 ans c’est un homme déjà âgé pour l’époque, ruiné, abimé par les maladies et les accidents. Mais il avait une vision, celle de développer une agriculture raisonnée qui bénéficierait à tous. Il était, je pense, habité par l’esprit du siècle des lumières dans lequel il avait grandi. Sa dernière qualité était de savoir s’appliquer à lui-même ses conseils.

Enfin, le plus élégant est que finalement il n’a rien « inventé » de nouveau, il a juste simplifié un outil existant : il a en fait juste enlevé les roues du train avant des charrues. L’approche par la simplification est également un des enseignements de cette histoire et nous devrions toujours le garder en mémoire. C’est un innovateur exemplaire plus moderne que beaucoup d’entre nous.

2) You identify 4 phases in the innovation process: observation, maturation, résolution, and go to market / roll-out. Where do you think are the most difficult hurdles? Which are the tricky moments?

Ces quatre phases invariantes sont des points de repères pour les innovateurs. Elles mettent en œuvre un mélange de qualités propres à l’être humain mais sont pénalisées par des contradictions apportées par notre éducation et nos modes de fonctionnement hiérarchiques. Ce qui nous est profondément naturel c’est l’Observation (en tant qu’êtres humains nous passons notre temps à observer notre environnement et à transmettre aux autres ce que nous avons découvert). La résolution est également naturelle dans ses dimensions de « faire ensemble » et de « jouer » à résoudre les questions (et de résoudre la question en premier si possible !). La propagation a également une dimension naturelle en cela que nous sommes tous très forts pour inventer des usages nouveaux … regardez les jeunes générations.

En contrepartie nos esprits « rationnels » et « efficaces » n’aiment pas considérer les petites choses, les usages marginaux ou nouveaux et ce phénomène pénalise la phase d’observation. Car c’est bien dans ce « petit » que se cachent les innovations. Par définition, toutes les innovations ont commencé par des petites choses. Ces mêmes esprits ont tendance également à se précipiter sur la première solution qu’ils perçoivent et nous savons que la première solution n’est jamais la bonne. Par ailleurs la certitude d’avoir LA solution nous empêche fréquemment de comprendre les véritables usages attendus par les clients. Ce phénomène pénalise les phases de résolution et de propagation.

Mais de mon point de vue la plus grande difficulté se trouve dans la phase de maturation au cours de laquelle il s’agit de faire des liens entre des éléments et des observations épars et de faire évoluer notre vision du monde, nos idées, … nos paradigmes.

L’esprit humain est naturellement formaté pour classifier les éléments. Ces taxinomies chères à Claude Levy Strauss sont fort utiles mais induisent une stabilisation des paradigmes. Par ailleurs nos comportements sociaux sont faits pour respecter cette classification. Les individus ont tendance à se conformer à l’avis du groupe, ce qui pénalise l’expression et la compréhension d’approches différentes.

D’où une réelle difficulté à faire « bouger » les paradigmes. D’abord il faut savoir trouver quels paradigmes interroger, puis avoir la possibilité de l’exprimer à d’autres qui peuvent le comprendre puis enfin de co-élaborer l’évolution dudit paradigme. Et bien souvent il faut pouvoir remonter aux « croyances mères » qui sont profondément ancrées dans nos imaginaires puis affronter de nombreux freins issus de nos pratiques quotidiennes. Le « penser autrement » proposé par Arthur Schopenhauer est plus facile à dire qu’à faire !

3) Collaborative and participative are recurrent words in your book: how do you this approach rising nowadays? What are successful use cases that you could share with us?

Reynald Chapuis a mené à Pôle Emploi une remarquable démarche participative qui a réussie à toucher la moitié des collaborateurs de cette institution. Par participatif, nous entendons le fait de demander aux collaborateurs d’apporter leurs idées et propositions sur une thématique donnée. Les démarches participatives sont souvent les actions les plus simples à mettre en place et bien souvent permettent de découvrir des « pépites » rapidement utiles aux organisations. Néanmoins le participatif a ses limites et doit être vu comme un moyen qui ne peut être que le premier pas d’une démarche d’innovation. C’est néanmoins un moyen utile pour faire savoir aux collaborateurs qu’ils peuvent exprimer des idées pour l’institution.

Le collaboratif est plus complexe dans la mesure où il s’agit de co-élaborer une vision, une solution ou une démarche. Techniquement c’est bien la mise en œuvre d’un ensemble d’intelligences multiples qu’il s’agit de réaliser. Bien souvent ces démarches se heurtent à de nombreux freins comme ; les égos, les formes d’intelligences qui ne se comprennent pas, le poids des hiérarchies, les travers de nos formations intellectuelles, les comportements sociaux,  etc … Dans cette mise en œuvre c’est bien souvent nous-mêmes qui sommes nos propres freins. C’est pour cela que j’incite régulièrement les Dirigeants à commencer par innover pour eux même. Le concept d’innovation est intéressant mais c’est la pratique de l’innovation qui enrichit. L’opportunité de la période actuelle c’est bien que les entreprises et les institutions ont compris qu’elles devaient trouver d’autres manières de faire. C’est un des grands enjeux pour la France qui est loin d’être la meilleure dans ce type d’exercice.

Néanmoins, un exemple remarquable a été mis en place par la ville de sceaux dans le cadre de son programme d’économie sociale et solidaire « Sceaux Valley », piloté par Othmane Khaoua, dans lequel ce sont les citoyens qui co-construisent leurs projets (répondant pour le coup aux besoins réels du territoire) en partenariat avec un éco-système d’entreprises et d’associations mis en place par la ville. La ville joue ainsi un rôle de facilitateur. Ce sont plus de 106 projets qui sont en train de voir le jour … Un succès. Pour la France il s’agit là d’une inversion du mode d’administration  qui passe d’une posture de tendance dirigiste à une posture dans laquelle les populations peuvent contribuer directement aux sujets qui les concernent… une innovation de rupture pour nous.

En conclusion, j’aimerais revenir sur les principaux paradigmes de notre époque. Pour ma part je suis interpellé par le paradigme du progrès. A l’époque de Dombasle en 1816, la révolution industrielle était à ses débuts et de nombreuses voies alternatives existaient ; sur les modalités du travail, sur les produits et sur les besoins de la société. Le milieu du 19 ème a vu s’affirmer la notion de progrès telle que nous la connaissons depuis et dont nous percevons maintenant plus clairement les conséquences sur la nature et sur nos modes de vie modernes. Cette notion de progrès est fortement influencée par la dimension technique et technologique ainsi que les jeux d’intérêts dans lesquelles elles se développent. En parallèle, mais plus discrètement nous assistons à la remarquable avancée des connaissances en matière de sciences humaines, de compréhension du cerveau humain .., c’est-à-dire de nous-mêmes, de nos fonctionnements et de nos attentes. Je ne suis pas certain que le « progrès » et nos attentes soient complètement compatibles.  Dit autrement quelles attentes avons-nous du « progrès » ? Quels ajustements de cette notion seraient nécessaires ? J’aimerais savoir ce qu’en pensent vos lecteurs du monde entier ?

Vous avez la chance de contribuer à une communauté d’innovateurs du monde entier et je profiterais volontiers de l’opportunité de cette interview pour les interroger à mon tour et leur demander quels sont, de leurs points de vue, les principaux paradigmes qu’il faudrait interroger ?.

A vous …

https://egide-and-co.com/portfolio/conference-bpi-beaubourg-le-plaisir-dinnover/

 

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